Hervé Malinge nous parle de Data Marketing

Riche de ses nombreux retours d’expérience, Hervé Malinge accompagne et conseille les entreprises dans la compréhension et l’exploitation de leurs Données Clients. Il aide également les entreprises à choisir la bonne solution marketing qui répondra à leurs enjeux et leurs objectifs business.

Économètre de formation, Hervé Malinge possède une longue expérience dans le CRM marketing et la Data Science. Il a fondé successivement Profil One, spécialiste du datamining et de la Connaissance Client, Score MD, éditeur d’une solution CRM permettant d’automatiser les scénarios marketing clients pilotés par de l’IA et des algorithmes prédictifs. En 2013, il anticipe les futurs enjeux des marques et crée la société MAKAZI, éditeur d’une CDP (Customer Data Platform) permettant de consolider les données CRM et digitales afin d’améliorer l’expérience utilisateur. 

Fort de toutes ces expériences, il crée en 2018 l’agence IOOCX spécialisée dans le CRM et l’optimisation des parcours clients pilotés par la Data Science et l’intelligence artificielle. En 2023, il crée 1FOR1 et développe une offre Data & CRM basée sur l’IA destinée aux directions marketing pour leur permettre d’améliorer la connaissance de leurs clients et de personnaliser les interactions avec chacun d’entre eux sur tous les leviers d’activation.

Dans cette interview, Hervé Malinge vous partage :

  • L’importance cruciale de la qualité des données (prérequis indispensable pour une exploitation optimale des informations clients).
  • Les meilleures sources de données pour une connaissance approfondie des clients.
  • Les facteurs de réussite d’un projet de Data Marketing.
  • Ses recommandations pour gagner en productivité.
  • Les outils à privilégier.
Interview d'un Expert en Data Marketing

Hervé Malinge, Expert en Data Marketing

Découvrez la retranscription du témoignage de Hervé Malinge.

La notion de Data Marketing est très présente dans ton parcours. Quels sont les principaux enjeux pour les entreprises concernant la gestion des Données Clients ?

L’enjeu principal est toujours le même depuis bien longtemps (sauf qu’on a tendance à l’oublier). C’est disposer de données de qualité et fiables. Comme on dit en anglais : “Garbage in, garbage out”. Autrement dit, des données “pourries” en entrée donneront des résultats “pourris” en sortie. 

Comme je le dis souvent, 80 % du temps d’un analyste est malheureusement consacré à la préparation des données. Et 20 % à l’analyse de cette donnée. C’est encore vrai en 2024, même si les outils d’aujourd’hui permettent d’aller plus vite et de disposer de données de plus grande qualité.

Les Données Client émanent de différentes sources. Il faut donc les trier et les réconcilier avant d’envisager de les analyser.

Quelles sont les données sources à prioriser aujourd’hui ?

Il existe de nombreuses sources de données, mais les principales qui génèrent le plus d’informations sont toujours les mêmes :

  • Les données d’achat issus des ERP (Enterprise Resource Planning) : produit(s) acheté(s), montant dépensé, date de l’achat, profil du consommateur…
  • Les données digitales/comportementales issues du tracking web : informations consommées sur un site web, une application mobile, fréquence et durée de visites…

En croisant ces deux types de données, nous sommes en mesure de définir très précisément les profils et les comportements des consommateurs. Et surtout de prédire leurs futures actions (intérêts pour un produit, nouvel achat, churn…).

Les données First-party (collectées par l’entreprise auprès de ses consommateurs) et les données Zéro-party (données qu’un client partage intentionnellement et de manière proactive avec une entreprise comme ses préférences, ses intentions d’achat) sont les données à privilégier dans le cadre d’un projet Data Marketing.

Selon toi, quelles sont les clés de succès d’un projet Data Marketing ?

Le point de départ est de travailler sur des données fiables que vous avez préalablement auditées et « nettoyées ». Le danger est ensuite de se perdre dans l’océan d’informations à analyser. En effet, trop d’informations tue l’information ! 

Il faut donc être capable d’extraire les « bons » indicateurs qui fournissent un maximum d’enseignements pour identifier des leviers business et déclencher des actions marketing pertinentes. Si vous ne savez pas quel enseignement tirer d’un indicateur, alors il ne sert à rien et il faut « l’oublier » ! 

Au final, le travail d’analyse d’une Base de Données Clients équivaut à de la R&D et peut être comparé à un travail d’enquêteur. À partir de là, il faut transposer les indicateurs retenus en scénarii marketing et CRM, qui vont générer du ROI (Retour sur Investissement), et donc du chiffre d’affaires, pour l’entreprise.

Pas de ROI sans un traitement efficace des données. Mais comment faire pour réussir sa segmentation, son scoring ?

Partez systématiquement de vos objectifs marketing. Par exemple, si vous voulez :

  • Augmenter votre valeur client : il faut mettre en place un score ou une segmentation pour repérer les clients à potentiel et décliner un plan d’action marketing en fonction de ces profils cibles.
  • Diminuer votre taux de churn : identifiez les futurs clients churneurs pour les retenir (avec une offre, un message, un scénario adapté à leurs profils) avant qu’il ne soit trop tard.
  • Maximiser votre taux de conversion : vous devrez détecter les profils de prospects les plus chauds pour les adresser en priorité.

Au final, il ne peut y avoir de traitement efficace des données si vous n’avez pas défini des objectifs très clairs qui vont orienter vos actions.

Tu nous partages quelques-unes de tes “recettes personnelles” pour réussir un projet de Data Client ?

Clairement, il n’y a pas de recette miracle qui fonctionne à tous les coups. Chaque secteur, chaque problématique client est unique. Il faut donc faire du sur-mesure.

Une fois qu’on a dit ça, il vaut mieux éviter de vouloir mener tous les chantiers de front. Et préférer opter pour une approche “quick win”. C’est-à-dire que vous priorisez les enjeux, avant de les traduire en scénarii, eux-mêmes classés en fonction de leur ROI potentiel estimé.

C’est seulement ensuite qu’on passe à l’analyse de la data pour répondre à chacun des enjeux identifiés. Paradoxalement, il faut savoir oublier la data pour parler marketing et business (les sujets qui importent vraiment). 

Y a-t-il des outils à utiliser plus particulièrement dans ce type de projet ?

Il existe effectivement des solutions qui vont permettre de préparer et fiabiliser les données, d’autres d’automatiser les traitements récurrents et industrialiser les algorithmes construits au départ du projet en « version POC ». D’autres outils du marché (comme les CDP) permettent de centraliser les données de sources différentes (données CRM, données digitales…) et d’activer des audiences sur différents canaux de communication (campagnes média, email…).

L’envers de cette profusion d’outils, c’est qu’il est difficile de faire le bon choix. Mon conseil est simple : partez là encore de vos besoins et de vos objectifs.

Par exemple, je viens de démarrer une mission où le brief de départ était le suivant : “Hervé, je veux un outil marketing”. Je leur ai dit de prendre le sujet par l’autre sens. On va d’abord étudier et comprendre :

  • Quels sont vos objectifs ? 
  • Quels sont les cas d’usages à déployer ?
  • Quelles sont les données que vous avez à disposition ?

En fonction des réponses à ces questions, on verra quel est le bon outil adapté à vos attentes et à vos objectifs. L’outil reste un outil. Ce n’est pas lui qui va driver le business. C’est ce qu’on en fait concrètement.

Tu vois des compétences particulières à mobiliser dans ce contexte ?

Il est nécessaire de disposer de compétences techniques et métiers pour réussir un projet Data Marketing. Les Data Engineers vont travailler sur la structuration des données et l’automatisation des traitements, les Data Scientists créent les modèles mathématiques, les Data Analysts « font parler » les données et les Marketing Scientists traduisent les résultats en actions marketing.

Donc des compétences très techniques à la base, avec cet enjeu d’être toujours proche de l’opérationnel et du marketing client. Tous les projets qui se plantent sont des projets qui ont été pensés uniquement sur le plan technique, sans objectifs ou cas d’usage concrets derrière. 

Les nouvelles tendances, notamment en matière d’IA, ne vont-elles pas faire disparaître tous ces métiers ?

Je ne le crois pas. Parce que la place de l’humain y est hyper importante. Avec l’IA, nous avons très clairement franchi un palier dans l’analyse des données et la recherche de signaux faibles, l’industrialisation des tâches récurrentes, l’efficacité et la productivité des actions, la personnalisation des communications, l’expérience client… 

Mais le contrôle à tous les niveaux est essentiel. Laisser faire la machine, oui. Mais il faut la piloter, la contrôler, voire la freiner parfois. On ne pourra donc pas se priver de ces compétences humaines.

Ce qui t’anime au quotidien ?

J’aime partir d’une feuille blanche, avec aucun a priori pour gérer les problématiques liées aux données de mes clients. Avec une approche d’enquêteur, de chercheur. Nous trouvons alors des choses que nous n’avions pas forcément imaginé au départ. Et ça, c’est assez magique.

A partir de là, j’aime concevoir et traduire les résultats en leviers business et déployer des scénarios marketing. Ils ne seront pas tous ROIstes au début. Mais c’est un processus itératif qui s’améliore au fil de l’eau. C’est en cela que l’IA ouvre aujourd’hui de nouvelles perspectives qui semblent sans limite à ce jour…

Propos recueillis et retranscrits par Thibaut Huertas.

Propos recueillis et retranscrits par Thibaut Huertas.