« Grâce au mobile, une marque peut construire une relation directe avec le client » – Interview de Catherine Caillaud, consultante en CRM mobile
Catherine Caillaud est l’une des grandes spécialistes du CRM mobile chez CustUp. Elle a pu assister pendant sa carrière à l’émergence de ce petit objet qui ne nous quitte plus. Dotée d’une solide expérience en marketing mobile, Catherine Caillaud exerce aujourd’hui le métier de consultante en Relation Clients Mobile. Nous l’avons questionnée sur son parcours et sur les spécificités du CRM mobile.
Que faisais-tu avant de devenir consultante en Relation Clients Mobile ?
Auparavant, je travaillais en entreprise dans le domaine du marketing et de la communication. Dans un premier temps, j’ai travaillé dans des entreprises de grande consommation comme Henkel et William Saurin en marketing traditionnel. Je faisais du marketing produit en effectuant des tâches de développement de produits, y compris en recherche & développement. Je faisais aussi de la commercialisation classique avec la mise en place de promotions.
Ensuite, j’ai travaillé chez SFR dans le marketing et la communication au sens très large du terme. J’ai travaillé sur du marketing de l’offre avec le développement de campagnes de publicité. J’ai pu observer les différences dans le CRM entre la grande consommation et le service.
Peux-tu nous éclairer sur ces différences d'approche du CRM ?
A l’époque, il n’y avait pas forcément de CRM dans la grande consommation. Il y avait des services consommateurs plus ou moins balbutiants. Le CRM est plus inhérent aux métiers du service puisqu’il s’agit de service rendu aux clients. Dans ce secteur, la Relation Clients est liée à l’offre elle-même. Avec Internet et les possibilités digitales, la notion de service s’est intensifiée, même dans les produits de grande consommation. Auparavant, c’était le distributeur qui était en contact avec le consommateur, pas la marque. Maintenant, grâce au digital et au mobile, une marque peut construire une relation directe avec lui.
Tu as assisté à l’émergence des services mobiles chez SFR, cela devait être particulièrement intéressant...
Oui, totalement. Lorsque je travaillais chez SFR, au départ, j’étais concentrée sur le marketing de l’offre et la communication. Puis je me suis tournée vers le développement d’usage des services. Il s’agissait de faire en sorte que les abonnés utilisent des services en plus de téléphoner. C’était intéressant à plus d’un titre. Je me suis rendue compte de la difficulté pour une marque de sortir de son cœur de métier. Chez SFR, il fallait vendre autre chose que des minutes, comme de la data et des services.
Autre difficulté, celle de dédier des ressources humaines et financières à cette diversification. L’idée a été d’aller chercher des partenaires extérieurs pour créer de nouveaux usages. Durant Loft Story par exemple, on demandait pour la première fois de voter par SMS. D’une certaine façon, cette manière d’aller chercher de nouveaux clients en innovant a contribué à la naissance du marketing mobile. Le marketing mobile aujourd’hui, ce sont des marques qui utilisent des services mobiles pour interagir avec leurs clients. Il y a quelques années, les opérateurs proposaient de télécharger des applets java, des sonneries ou des petits jeux. Ce sont les ancêtres des applications. Sauf que désormais, les recettes ne profitent plus aux opérateurs… Même s’ils ont initié ce genre d’usages.
Qu’est-ce que tu aimes dans le métier de consultante en CRM mobile ?
Pour moi, le principal intérêt de travailler dans le CRM mobile comme consultante est la variété des missions. Lorsque l’on fait ce métier, on ne va pas dans le même bureau tous les matins, on ne voit pas les mêmes personnes et on ne travaille pas sur les mêmes dossiers. C’est très oxygénant et motivant. Cela permet d’être toujours en éveil et d’avoir le cerveau toujours en marche. L’autre intérêt est d’être externe aux organisations. Cela donne une certaine liberté de penser. Il n’y a pas les entraves que l’on peut avoir lorsque l’on est salarié. Il y a également quelque chose d’assez magique qui se crée lorsque l’on est consultant : les connexions entre les missions. On peut alimenter chaque dossier avec quelque chose que l’on a appris ou vu. C’est un enrichissement permanent.
Faut-il une qualité ou un talent particulier pour exercer le métier de consultant en CRM mobile ?
Il faut de l’écoute pour comprendre son client, pour comprendre ce qui est dit mais aussi ce qui n’est pas dit. Il faut de la rigueur et de l’organisation. Les consultants ont davantage de comptes à rendre qu’en entreprise. Il faut aussi être constructif afin de faire avancer les choses. Mais s’il fallait garder une qualité, je dirais l’adaptabilité. Nous sommes toujours confrontés à des problématiques, des personnes et des entreprises différentes donc il faut être capable de s’adapter.
Tu es experte en Relation Clients Mobile, en quoi cela consiste ?
D’abord, il faut s’interroger sur ce qu’est le mobile. C’est à la fois un outil, un média et plein de choses à la fois. Quoi qu’il en soit, c’est un appareil particulier, notamment du point de vue du CRM, car il est individuel et détenu en permanence par l’utilisateur. Il faut comprendre ce que le mobile a de spécifique pour définir sa place et son rôle dans la relation clients. Le mobile évolue sans cesse. Les possibilités et les contraintes ne sont pas les mêmes qu’il y a quelques années.
Actuellement, c’est la question de la protection des données qui se pose. Le mobile permet de collecter énormément d’informations, qu’il est parfois le seul à pouvoir collecter. Les données sont le carburant de la connaissance client et le mobile est un véritable réservoir de ce carburant. Il fait également évoluer ce que l’on entend par Relation Clients. Avec le mobile, une marque peut désormais interagir avec le client dans un point de vente par exemple. Il faut toujours réfléchir aux manières d’utiliser ce support pour une relation clients plus riche et plus efficace.
Sur quelles missions as-tu travaillé pour CustUp ?
J’ai travaillé brièvement sur la mission Burger King, puis j’ai travaillé chez Clarins sur l’optimisation de la relation clients à distance. Clarins était dans une phase de migration de son Centre de Contacts. Cela a été l’occasion pour eux de mettre à plat leurs outils de communication, leur discours de marque et les traitements sur les contacts. Cela a commencé par l’identification de tous les motifs d’entrée en contact avec les marques, puis il a fallu apporter des réponses normées et dans l’esprit de la marque. Tous ces outils ont ensuite été ajoutés à une grande base de connaissances.
Selon toi, quels sont les freins à la réussite d’une mission ?
Je pense que le frein majeur est le manque de clarté. Il y a forcément un loup lorsque les objectifs CRM de la mission ne sont pas clairs. Il faut aussi que le rôle du consultant CRM mobile soit clarifié. Ce n’est ni confortable ni efficace de travailler dans le flou.
Quelle a été la tâche la plus complexe que tu aies dû accomplir durant tes missions ?
Ce qui est le plus difficile est de rassembler les informations, qu’elles viennent de l’intérieur de l’entreprise ou de l’extérieur, quand il faut chercher de bonnes pratiques et des chiffres récents.
Pourquoi est-ce indispensable pour les entreprises d’avoir une stratégie de CRM mobile ?
Le mobile est un outil personnel, il est donc précieux pour la Relation Clients. Il permet de connaître de nombreuses choses sur son détenteur et d’être pointu lors des interactions. Une fois sur deux, un e-mail est ouvert sur un mobile. Si la société n’a pas pris soin de l’adapter afin qu’il soit lisible, elle va perdre la moitié de ses clients potentiels. Dans la Relation Clients aujourd’hui, l’objectif est d’être en conversation permanente avec ses clients et le mobile est l’outil idéal pour cela.
Quelles sont les bonnes pratiques en matière de Relation Clients mobile ?
Je viens d’évoquer la conversation permanente. Je dirais qu’en plus d’être permanente, elle doit être pertinente. Il faut donc qu’elle soit ciblée, qu’elle arrive au bon moment et sous la bonne forme. Que ce soit via un chatbot, un SMS, un push ou un e-mail adapté. Si le message n’est pas personnalisé, c’est contre-productif. C’est synonyme d’insatisfaction de la part du client.
Selon toi, quel rôle peuvent jouer les objets connectés dans la Relation Clients ?
Le mobile est le premier objet connecté. Le deuxième, ce sont les montres. Mais elles ont créé une déception sur le marché car elles n’ont pas montré leur valeur ajoutée par rapport au téléphone. Les objets connectés jouent un rôle dans la Relation Clients car un grand nombre d’objets sont connectés par l’intermédiaire d’une application mobile. Donc il est possible d’avoir une conversation à travers un objet. Cela permet par exemple à des constructeurs de pèse-personne de faire du CRM. Ces marques changent complètement de modèle économique en passant d’un modèle industriel à un modèle qui intègre la Relation Clients.
Propos recueillis par Jordane Feuillet.